PARIS - ROUBAIX

 

Les secrets flandriens de Jacky Durand
(dépêche A.F.P., 07/04/00)

Jacky Durand, le plus belge des cyclistes français, connaît tous les secrets du Tour des Flandres, la course mythique qui l'a révélé en 1992 , l'année de sa victoire.
En pays flandrien, où la course annuelle tiendra lieu dimanche de grand messe du cyclisme, Durand retrouve ses marques. L'un des trois coureurs français victorieux dans toute l'histoire de la course créée en 1913 est apprécié par le public. Même les gendarmes belges le traitent bien, lui qui sourit encore d'un excès de vitesse vite pardonné quand son interlocuteur comprit que le fautif était un ancien lauréat du Tour des Flandres.
Pour le Mayennais, qui avait gagné après une mémorable échappée de 217 kilomètres, la priorité tient d'abord à la fréquentation du terrain: "J'avoue que je connais par coeur le parcours du Tour des Flandres, contrairement à celui de Paris-Roubaix que j'ai du mal à mémoriser. Peut-être parce que j'ai été longtemps échappé, peut-être aussi parce qu'on passe les monts et leurs abords six ou sept fois dans l'année, dans le Het Volk et les autres classiques belges".
L'explication est d'abord technique. "Pour gagner, il faut absolument être placé avant chaque mont, dit-il. Sinon, on peut se faire piéger même en étant fort. Potentiellement, un coureur comme Jalabert a les jambes pour gagner. Mais, quand il est venu, il a très mal couru. Cela prouve bien qu'un très grand champion, par inexpérience, peut échouer dans le Tour des Flandres."
Est-il lui-même à égalité de chances avec les natifs du plat pays ? "Je connais même certainement mieux les routes du Tour des Flandres que certains Belges", sourit-il. "Bon nombre d'entre eux n'ont jamais monté le Koppenberg de leur vie. Moi, j'ai dû y passer quinze fois à l'entraînement bien qu'il ne fasse plus partie du parcours".
Aux jeunes, Durand (33 ans) offre ses conseils: "Certains qui ont envie de se battre viennent me voir. On leur parle du Patersberg, du Kluisberg, ils ne savent pas du tout si c'est pavé, si ce sont des grandes ou des petites routes. Je suis toujours prêt à leur expliquer. A partir du moment où ils arrivent à passer ces courses, on
en fait des coureurs."


L'époque a changé pourtant. Sa victoire a mis fin à la fatalité de la défaite en terre flandrienne. "Dans les équipes françaises,
raconte-t-il, on mettait les blessés, ceux qui ne marchaient pas bien. Quand j'ai gagné, nous étions six au départ alors que les autres équipes partaient à huit coureurs. On s'en allait le matin pour terminer la course. Alors, se retrouver face à la ligne droite d'arrivée en sachant que l'on a gagné l'un des monuments du cyclisme!"
Tout monument se mérite et Durand, qui ne parle pas le flamand, a dû apprendre certains mots. "Il faut absolument connaître le vocabulaire flamand. Le mot qui veut dire attention (il prononce "pas op"), links, rechts, gauche, droite... Celui qui ne comprend pas ce qui se dit dans le peloton réagit trop tard sur une bordure, un trou dans la route."

 

Cette rude école, "le vélo à l'état pur" pour Durand, possède aussi ses codes, ses gestes gratuits: "De la même façon que je
laisserai passer un Johan Museeuw, un Andrei Tchmil, un plus petit coureur me laissera passer pour que je puisse me placer." Et de glisser, songeur : "C'est vrai que cela peut servir à certains moments..."
 
 

 « Ca paiera bien un jour ! »

Une fois de plus, Jacky Durand pouvait pester contre la malchance dans une course qui, décidément; lui échappe. « C’est toujours pareil, regrette-t-il, les années où j’étais moins bien je n’ai pas connu le moindre pépin, et dans un jour comme aujourd’hui qui semblait pour moi s’apparenter à un grand jour, je suis contraint de subir trois crevaisons, et toujours à un mauvais moment.... »
En s’immisçant astucieusement dans l’échappée du 36° kilomètre aux côtés de Steels et de Konyschev, notamment, il est vrai que le Mayennais de l’équipe Lotto avait très vite produit une très grosse impression lors des premiers secteurs pavés : « Je voltigeais, confirme-t-il, je ne sentais pas mes jambes sur les pavés et, d’ailleurs, j’essayais même de ne pas rouler trop vite pour ne pas perdre trop de coureurs en route, ce qu’il fallait faire si l’on voulait conserver nos chances... Et puis je crève juste avant la tranchée de Wallers-Aremberg et, forcément, je n’en ressors pas trop bien. Aussitôt après, c’est une autre crevaison, et là ça commence à se gâter sérieusement. Le reste de l’après-midi, je l’ai passé en chasse-patates, mais jamais très loin de la tête, ce qui est sans doute le plus rageant... »
A sa manière d’effacer la déception (31° néanmoins), il convenait alors seulement : « qu’en onze participations, je n’ai jamais obtenu le moindre résultat, mais un jour ça pourrait finir par me sourire...

G
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